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Ben Leurquin - hommage à mon père (1954-2008)

Je n'ai pas pris la décision d'écrire pour te donner raison. Autant annoncer la couleur, au lieu de partir à mile lieux de cette douleur que tu as laissé dans mon coeur.

On s'est surtout connu au travers de l'ignorance réciproque, légitimée de ton côté, par ce passé que tu n'as jamais su oublier.

De toi, je me souviens de ce regard froid, transperçant d'intelligence et de subtilité me faisant comprendre avec fermeté, que j'allais payer pour tout ce mal que ton père t'avait fait. Certes, à l'époque je n'étais qu'un enfant mais, comme on le dit souvent, on ne choisit pas ses parents.

Je n'écris pas pour pleurer sur mon sort, mais bien parce que tu es mort et qu'il est temps de remettre les pendules à l'heure.

Aujourd'hui, je suis devenu grand. Malgré tout, je reste toujours accompagné de ce talon d'Achille. Ce gosse ayant appris qu'il allait mourir un jour ou l'autre, et que tu n'as pas su accompagner sur le chemin de la sérénité car, sur cette terre, seules les illuminés pensent pouvoir connaître l'éternité.

Je ne m'arrêterais pas là. Je tire chaque jour le poids de mes pieds. Je n'abandonnerais jamais, c'est la promesse que je te fais.

J'avoue que parfois, il m'arrive de vouloir plonger dans la mer, histoire de faire un pied de nez à la gravité. Je ne le fais jamais. J'ai tellement peur de jouir du mal des profondeurs, que je me redresse pour continuer d'avancer.

Tu sais, j'en ai plus que marre de tenter le Diable. Tout comme toi, j'ai ressenti plus d'une fois le désir ardent de passer de l'autre côté, dans l'unique but de savoir ce qu'il y a dans l'au-delà. Cela étant, je viens d'avoir trente ans, et mon seul souhait est d'aller de l'avant. Je pense qu'il est temps de faire jaillir le fruit de toutes ces qualités qui furent les tiennes, qui sont en moi, et que tu n'as pas su exploiter parce qu'étant prisonnier de ton passé. Si je te dis tout ça, c'est pour te faire comprendre que je ne suis pas toi, à n'en point douter.

Ta destinée, tu l'avais programmée. Tu désirais mourir à cinquante ans et ce pari tu l'as gagné. Il ne me reste plus qu'à faire avec tout ça, même si souvent je me sens écoeuré par tous ces gens te ressemblant, désirant partir vers le néant avant même de s'être senti vivant.

Il s'agit sans doute du mal de l'infini, à vouloir voler à travers les cieux comme une étoile filante. Mais une étoile filante, c'est une étoile qui brûle et qui peut faire bien des dégâts. Peu importe, je pense que l'existence est une chance et qu'il est une erreur de cracher sur la vie.

Ici, la terre est toujours aussi basse de candeur. Mais oui, elle tourne toujours autour de son axe offrant aux hommes bien des splendeurs. A vrai dire, peu s'en montrent à la hauteur. Sans doute finira t'elle par se venger, Dieu seul le sait.

Pour conclure papa, je tiens seulement à te dire, que j'ai passé tellement de temps à rêver de tes bras m'enlaçant et me serrant, que tu es mort avant même que je ne puisse toucher du doigt cet espoir inaccessible, de réveiller en toi ce désir d'aimer ton fils parce qu'il était la chair de ta chair, et non l'ombre de ton père.

Adieu et Bon Vent

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